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Un chantier d’insertion grâce aux fleurs bio

Fleurs de cocagne, dans l’Essonne, accompagne socio-professionnellement des personnes en difficulté, surtout des femmes, en vue d’un retour à l’emploi. Un révélateur de talents, de compétences… applicables notamment en horticulture.Florence Mélix

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«Pôle emploi m’a informée de l’existence de ce chantier d’insertion par le végétal pas très loin de chez moi. J’ai décidé de pos­tuler et ma candidature a été retenue, raconte Marion­, salariée depuis un mois. Je suis compositrice et chanteuse, mais avec la crise sanitaire je ne travaillais plus. J’avais peur de ne pas arriver à réaliser les travaux physiques mais les encadrants nous motivent et sont à l’écoute de nos craintes et de nos envies. »

Ils ont sûrement cru davantage à son potentiel que Marion elle-même lorsqu’ils l’ont recrutée pour un contrat de quatre mois renouvelable.

Et à la voir aujourd’hui, rayonnante, l’équipe pluridisciplinaire a eu bien raison. « Ici, je m’ouvre à autre chose, je me reconnecte à la terre et mon côté artiste peut s’épanouir dans la création flo­rale. » À 27 ans, cette jeune femme développe également d’autres aptitudes comme celle de travailler avec beaucoup de calme et de minutie, ce qui lui permet, avant la reprise de la saison des fleurs fraîches, de participer aux semis en faisant montre d’une belle précision.

Vertus quasi thérapeutiques

Ce témoignage, c’est un peu l’âme et la raison d’exister de Fleurs de cocagne, un chantier d’insertion basé à Avrainville, dans l’Essonne. « Des personnes exclues du marché du travail pour mille raisons arrivent chez nous, explique François Bataillard, son directeur. C’est de notre devoir de les réveiller, de les remettre en route, de leur redonner de l’énergie et de les stimuler intellectuellement en leur proposant des activités proches de la vie réelle professionnelle, des fleurs jusqu’au maraîchage. En les accompagnant, nous devons parvenir à faire grandir leur esprit et, fi­nalement, à révéler leurs talents. »

Une belle ambition portée par les six salariés permanents au service des vingt-huit salariés en insertion actuellement embauchés (lire l’encadré ci-dessous), dont vingt-deux femmes. « Dans l’insertion par l’activité économique, la plupart des offres qui leur sont soumises concernent le ménage ou l’aide à la personne, explique Carole Bataillard, responsable commerciale de la structure. Avec Pôle emploi et la direction départementale du travail (DDT), nous voulions­ proposer une alternative par l’activité agricole car nous savons que ce support est très effi­cace pour un retour à l’emploi. L’insertion par le travail de la terre a des vertus quasi thérapeu­tiques reconnues grâce­ à la reconnexion au vivant, au cycle naturel, au climat... et d’autant plus pour les personnes vivant­ en zone périurbaine comme ici. »

105 salariés accompagnés en sept ans

Semer une graine, la voir germer et se développer, puis vendre le produit fini, cela a du sens et donne de la satisfaction aux salariés. Mais le maraîchage a une image plutôt masculine, physique, salissante... Le travail des fleurs, lui, est perçu comme plus « luxueux ». Avec le côté artistique et « l’expression de soi » à la fleuristerie, ainsi que la vente directe, les femmes sont davantage attirées par cette production. « Dans les statuts de l’association, nous nous engageons à embaucher un minimum de 70 % de femmes », précise Carole.

Depuis la reprise de l’exploitation horticole et maraîchère d’Avrainville en 2014 (lire l’encadré ci-dessus), 105 salariés en insertion ont été recrutés, pour des contrats spécifiques d’insertion. Pôle emploi ou les acteurs sociaux identifient des personnes qui souhaitent reprendre une activité mais qui n’y parviennent pas à cause de freins qui ne peuvent être levés par l’établissement public. Il peut s’agir de problèmes linguistiques, d’addiction, de santé, de savoir-être, psychiques, sociaux (situations de handicap ou des personnes âgées à charge au domicile...), un handicap non décelé, etc. Elles reçoivent un agrément pour travailler en chantier d’insertion . Elles postulent puis ont à passer un entretien avec la personne en charge de l’accompagnement socio-professionnel et la coordinatrice. « Quand une personne candidate, la première question que nous nous posons, c’est : “Peut-on l’aider, et comment ?” », note Carole.

Les salariés en insertion sont suivis et chaperonnés par les encadrants pour prendre confiance en eux, lever les freins à l’employabilité, identifier un projet professionnel, écrire un curriculum vitae, une lettre de motivation, passer un entretien d’embauche.

Près de 60 % de sorties positives

Le site d’Avrainville compte entre 55 et 60 % de sorties « positives » avec, dès la fin du contrat d’insertion, un retour à l’emploi durable (en CDI ou CDD de six mois renouvelable minimum) ou une orientation vers une formation professionnalisante. Depuis 2014, ils sont dix salariés en insertion à avoir poursuivi leur parcours vers une activité liée au végétal. « En réalité, en comptant tous les autres bénéfices – se stabiliser, acquérir des savoir-être professionnels, trouver un logement, régler ses dettes, prendre soin de sa santé psy­chique et physique, retrouver de l’estime de soi, sortir de l’isolement, se sentir utile et intégré à la société en travaillant, être fier d’être autonome au niveau financier... –, je dirais qu’il y a 99,9 % de sorties positives », se réjouit Carole.

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